Normalien, agrégé d’histoire, l’auteur a vécu 15 ans au Japon, où il représente aujourd’hui Sciences Po à Tokyo. Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur ce pays.
Le Japon est un véritable paradoxe. On le dit en crise depuis 25 ans, mais il reste la troisième économie mondiale, le premier investisseur mondial, son produit intérieur brut (PIB) par habitant est égal à celui de la France, le chômage y est inexistant, la vie y est paisible et sûre, et le crime organisé a beaucoup plus régressé qu’en Italie ou aux États-Unis. On croit le Japon peu innovant, mais il occupe la cinquième place sur l’indice de compétitivité globale 2018 du Forum économique mondial, 12 rangs devant la France. Il a mis en service ses trains à grande vitesse 18 ans avant elle ; il a changé la vie des jeunes en inventant le walkman et la console de jeux Nintendo ; il a produit la première voiture hybride de série 20 ans avant les autres et mis à genoux le numéro un mondial de la photographie, Kodak, lors du passage de l’argentique au numérique. Le Japon est secoué par 1 000 séismes chaque année, mais ses immeubles tiennent bon, ses trains arrivent à l’heure (on devrait dire à la seconde) et ses services publics sont impeccables et courtois. Certes, on pourrait citer en contre-exemple la catastrophe de Fukushima, mais aucun pays occidental n’a connu un tsunami d’une telle ampleur.
Les Japonais se veulent un peuple à part qui fait nation à lui seul et dont la culture, la langue et la civilisation sont à nul autre pareilles. Ceci au mépris de la réalité historique puisque le mythe d’« une seule nation millénaire, un seul peuple », remonte en fait à la période Edo (1608-1868), qui vit le Japon se fermer au monde pour fo...