L’analyse économique se bornant à n’appréhender que les faits sociaux mesurables à l’aune monétaire, elle s’est peu intéressée au temps libre, sinon pour la part dévolue à la consommation, et a largement contribué à faire du travail l’élément structurant de toute la vie sociale sauf, depuis Aristote, à s’interroger sur l’impact de la machine sur le chômage pour amener certains à annoncer l’ère des loisirs.
Joffre Dumazedier, tout en rappelant combien (et comment) en l’espace d’un siècle le temps de travail a été considérablement réduit et quelles prévisions en la matière ont été émises, souligne le fait que le temps non travaillé dans la sphère monétaire, faute d’analyse adéquates, a été abusivement assimilé à un temps libre, supposé exempt de toutes contraintes.
Il montre en particulier que l’accroissement du temps hors travail, subi ou conquis, est grevé d’activités souvent non choisies. En analysant en particulier les usages qui sont faits du temps libre, il souligne la différence entre les temps contraints et le temps vraiment disponible au profit des loisirs, l’image plus ou moins positive de celui-là et l’usage qui en est fait en fonction, très largement, des valeurs.
En s’interrogeant finalement sur la signification et l’importance du temps libre, l’auteur montre en réalité comment pourrait progressivement s’esquisser une tout autre organisation de la vie en société et pourraient apparaître d’autres modes de vie.
Le temps libre, cet inconnu
Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 165, mai 1992