Que d’épreuves pour le nouveau-né qui doit apprendre à connaître son environnement ! Reconnaître l’identité de sa mère, identifier son visage puis les autres visages et lire leurs émotions, comprendre la signification des sons et donner un sens au langage. Les neurosciences recherchent les outils dont il a hérité à la naissance pour accomplir ces performances : faire la part entre l’inné et l’acquis dans ces apprentissages. La recherche dans ce domaine a longtemps été orientée par les travaux de Jean Piaget (1896-1980), suivant lequel les performances cognitives se développent en fonction de leurs interactions avec l’environnement (constructivisme). Selon lui, il n’existe aucune activité intellectuelle avant l’âge de deux ans. Le point de vue de Piaget a été réexaminé dans plusieurs domaines, à la fois sur le plan comportemental et en utilisant l’imagerie cérébrale, et ces études ont conclu à la présence de facultés étonnantes chez les bébés.
Les bébés et la numérosité
De manière surprenante, des études ont montré que les bébés étaient sensibles à la notion de quantité, au nombre d’objets qui leur sont présentés. Et ce sens de la « numérosité » est présent à la naissance. Comment peut-on le savoir ? Dans une expérience réalisée avec des nouveaux-nés de 48 heures, Véronique Izard et ses collaborateurs [1] ont fait entendre des signaux sonores composés de répétitions de syllabes, soit 4, soit 12 syllabes. Après un temps de familiarisation, des images d’objets sont montrées sur un écran, soit 4, soit 12 objets identiques. L’attention des nourrissons est maintenue plus longtemps lorsque les séquences sonores et visuelles sont congruentes (même numérosité). Cette expérience est prise comme une indication de la perception abstraite de la numérosité puisque celle-ci est présentée sous deux modalités, sonore et visuelle.
Indépendamment de son résultat, ce travail montre que les bébés, tout comme les adultes, sont des sujets d’études expérimentales (photo ci-dessous) et les « baby labs » se sont multipliés. Le rés...