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Trois défis français

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Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 449, juil.-août 2022

En juillet 2020 étaient conclus, en France, les « accords du Ségur de la santé » qui prétendaient « garantir l’attractivité des métiers essentiels des soignants et la transformation des établissements de santé au profit des patients ». Depuis lors n’ont cessé de se multiplier les alertes sur « un système santé à bout de souffle » en raison des restrictions budgétaires, du manque de lits, de l’épuisement des professionnels du soin, des déserts médicaux ; en bref, de l’incapacité du système à répondre de manière satisfaisante à une demande de soins qui ne cesse d’augmenter, notamment en raison du vieillissement de la population. Deux ans après le « Ségur de la santé », à l’issue d’une visite dans un service d’urgence, le président de la République annonce lancer une « mission flash d’un mois » sur les services d’urgence afin identifier les « premières solutions opérationnelles » qui s’imposent, tout en reconnaissant qu’il va falloir encore « gérer la pénurie » pendant les 10 ans à venir. Il annonce également vouloir rassembler, à partir du mois de juillet 2022, une grande conférence sur la santé rassemblant toutes les parties prenantes pour fixer des objectifs au niveau national, avant de laisser les acteurs s’organiser pour mettre en œuvre des solutions différenciées en fonction de chaque bassin de vie – une reconnaissance salutaire des initiatives locales qui pourraient servir de modèles.

Nous en livrons aux lecteurs de Futuribles un heureux témoignage : celui du groupement d’intérêt collectif HUGO (Hôpitaux universitaires Grand Ouest) de différents établissements qui, se fondant sur plusieurs expériences menées à l’étranger, à l’initiative d’instances publiques autant que privées, plaide pour un « système de santé français intégré ». Cette forme d’organisation – faisant l’objet d’expérimentations dans cinq territoires en France – semble permettre de répondre à quatre objectifs essentiels : meilleure prise en charge des patients, meilleure santé de la population concernée, meilleur emploi des ressources budgétaires et meilleures conditions de travail des soignants. Intégrés, certes selon des modalités différentes, ces systèmes ont en commun de substituer à une organisation en silo (souvent par spécialité) une approche globale (systémique) de la santé de la population, depuis la prévention jusqu’aux soins eux-mêmes. Ce modèle d’organisation qui a inspiré le groupement du Grand Ouest fait aujourd’hui école dans d’autres régions ; il préfigure peut-être une solution pour l’avenir.

Un autre défi majeur est celui de la transition écologique, bien connu des lecteurs de la revue Futuribles. Le gouvernement français se réveille et assure vouloir désormais y accorder une attention prioritaire afin d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Après l’article présentant les scénarios Transition(s) 2050 de l’Agence de la transition écologique (ADEME) et celui portant sur les différentes études prospectives sur l’énergie (Futuribles n° 448), nous publions ici quatre scénarios sur les bâtiments à l’horizon 2050 (dont l’impact sur le climat est majeur, et dont le renouvellement et la rénovation exigent du temps et des moyens importants). Après avoir rappelé que les fonctions du bâtiment changent (se loger, se divertir, travailler…) et que celui-ci doit s’adapter à de nouvelles contraintes (vieillissement démographique, transitions écologique et numérique…), ces scénarios montrent comment peuvent évoluer l’offre et la demande à l’horizon des 30 prochaines années.

Ces deux chantiers, celui du système de santé et celui de la transition écologique, s’ils exigent une stratégie à long terme, soulèvent une question essentielle de gouvernance et d’équilibre à trouver entre ce qui incombe à l’État (sous réserve de sa manière de procéder, sans dirigisme excessif) et ce qui est du ressort d’une dynamique sociale collective. Dans le cadre du « Forum », sont publiés deux articles soulignant les risques qui pèsent sur nos libertés publiques : le premier revient sur les contraintes liberticides imposées par le gouvernement, notamment lors de la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19 ; le second sur le risque de voir s’instaurer une société de surveillance généralisée par le contrôle croissant de nos données personnelles. La demande sociale de sécurité justifie-t-elle ces pratiques, ou la peur est-elle cultivée, comme l’écrivait Étienne de La Boétie (Discours de la servitude volontaire, 1576), comme moyen de conforter le pouvoir des gouvernants ? Au risque, tout au contraire, qu’elle stérilise les capacités d’adaptation et d’innovation des citoyens, et leur capacité à coopérer entre eux, dont nombre d’auteurs, depuis Alexis de Tocqueville, ont souligné le rôle essentiel dans la démocratie et la poursuite du bien-être social.

Dans ce même numéro de Futuribles, il ne pouvait être question d’ignorer la guerre en Ukraine et « la longue marche vers l’Union européenne », ni de faire l’impasse, surtout dans la conjoncture économique actuelle, sur l’hypothétique regain de productivité depuis si longtemps attendu.

#Démocratie #Habitat #Liberté #Système de santé #Transition écologique
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