Futuribles a engagé, dans son précédent numéro (n° 417, mars-avril 2017), une réflexion sur la question du ralentissement des gains de productivité et ses conséquences dans les pays concernés. Après ce premier volet consistant à faire le point sur l’évolution de la productivité sur longue période dans les pays développés, sur le rôle du progrès technique et des facteurs immatériels, nous poursuivons la réflexion en nous penchant sur les indicateurs : la baisse des gains de productivité est-elle réelle ou résulte-t-elle du fait que les indicateurs statistiques sont inadaptés pour les mesurer correctement ?
Didier Blanchet montre ici comment la comptabilité nationale évalue l’économie en France, via le produit intérieur brut (PIB), et comment celui-ci intègre la diffusion du numérique. Les nombreuses innovations issues de la révolution des technologies de l’information et de la communication sont-elles mesurées à la hauteur de leurs apports effectifs à l’économie et au bien-être des consommateurs ? Pour aborder cette question d’un éventuel « mismeasurement », Didier Blanchet examine trois points qui lui paraissent essentiels dans ce débat. Le premier concerne le périmètre du PIB : qu’a-t-il vocation à mesurer et pourquoi ? Le deuxième point porte sur les problèmes de partage volume-prix des biens : comment faire en sorte de mesurer l’évolution des prix à qualité constante dans le contexte actuel de transformation marquée de certaines activités économiques sous l’effet du numérique ? Enfin, l’auteur évoque la question de la prise en compte du bien-être dans les indicateurs économiques, soulignant son importance mais rappelant que la comptabilité nationale ne prétend pas mesurer le bien-être : le débat relatif à cette prise en compte du bien-être dépasse celui relatif au PIB et à l’intégration du numérique dans celui-ci ; c’est un chantier autrement plus complexe dont les comptes nationaux ne sont qu’un élément (certes essentiel) parmi d’autres.