Une mise en perspective historique de la construction européenne mettra en évidence le rôle décisif qu’a pu y jouer l’agriculture. En instaurant une politique agricole commune (PAC) dès le début de ce qui deviendra l’Union européenne (UE), les promoteurs de l’idée européenne en ont fait une, si ce n’est l’unique, politique véritablement commune, dont les règlements, les prix, les soutiens divers, étaient partagés et admis par les différents États membres successifs. En une décennie, l’UE accède non seulement à l’autosuffisance alimentaire – objectif prioritaire assigné à la PAC – mais aussi au rang de grande puissance exportatrice, emmenée par les performances aujourd’hui discréditées de l’agriculture française. L’interventionnisme étatique dans le secteur agricole correspondait étroitement au keynésianisme ambiant, qui avait triomphé après la Grande Dépression des années 1930. Durant de longues années, l’agriculture bénéficie d’un budget conséquent, au point de demeurer le premier poste budgétaire de l’Union.
Le basculement des années 1980, annonciateur de la globalisation des économies et des vertus du libre-échange, va constituer un tournant décisif pour le secteur agricole, du point de vue tant économique et commercial que sociétal. De réforme en réforme, d’accords de libre-échang...