Roger Masters a déjà écrit pour Futuribles (n° 228, février 1998), mais à l’époque il parlait de l’avenir de l’État-nation. L’article ci-après porte sur un domaine plus restreint : pour parler comme Montesquieu, il ne s’agit plus de la » nature des choses » mais des » accidents de la fortune « .
L’auteur met en lumière les deux dimensions de cet » accident » majeur. D’abord sa composante altruiste. Raisonnant en termes de biologie évolutionniste, comme en 1998, il voit dans les kamikazes islamistes un exemple de comportement autosacrificiel poussant un individu à mourir si cela accroît les chances de survie et de reproduction d’autres individus partageant les gènes de l’altruiste. Le rôle de l’environnement n’est pas pour autant ignoré, puisque cet altruisme a plus de chances d’émerger dans des sociétés à forte natalité et à espérance de vie brève (les sociétés dites développées à faible natalité et longue espérance de vie ayant, à l’inverse, des comportements individualistes/hédonistes).
Quant à la composante destructrice, elle renvoie finalement à la mondialisation. Un univers de plus en plus imprévisible, un fossé sans cesse plus profond entre ce que sait l’homme de la rue et l’état de la science et de la technique : tout cela crée un besoin de boucs émissaires dont l’anéantissement remettra les choses à leur vraie place. C’est le rôle qu’un certain islam, qui promet le paradis à ceux qui meurent au champ d’honneur de la jihad, est incontestablement en train de jouer. Dans ses analyses comme dans ses recommandations, Roger Masters ne nous laisse cependant jamais oublier que toutes les croyances, qu’elles aient un fondement religieux ou nationaliste, peuvent se transformer en message de haine, mais qu’il n’y a là aucune fatalité. D’où son insistance sur la nécessité de refuser tout amalgame entre le mainstream Islam et les réseaux terroristes.
Les ressorts du terrorisme. Un essai d'étiologie appliquée à la recherche d'une juste riposte
Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 270, déc. 2001