La gauche, victorieuse aux élections législatives françaises du 1er juin 1997, a évidemment axé sa campagne – comme Jacques Chirac lorsqu’il était candidat aux élections présidentielles – sur la lutte contre le chômage et la fracture sociale. Parmi les principales mesures qu’elle s’est alors engagée à adopter figure la réduction du temps de travail à 35 heures sans réduction de salaire. La voici aujourd’hui investie de la responsabilité de conduire une politique qui, particulièrement en matière d’emploi, devra être plus efficace que celle des gouvernements précédents qui n’ont su endiguer ni la montée du chômage ni, a fortiori, le développement du sous-emploi.
Le nouveau gouvernement hérite de la précédente législature de la loi Robien, votée le 11 juin 1996 qui, en substance, encourage, par un allégement de cotisations sociales, les entreprises à réduire la durée du travail sans trop amputer les rémunérations, soit en vue de créer de nouveaux emplois, soit pour préserver des emplois qui, autrement, seraient menacés.
Cette loi, bien que récente, a dès à présent joué un rôle très efficace, d’une part en faveur de la relance des négociations collectives, d’autre part dans la conclusion d’accords nombreux destinés à consolider les emplois, voire à en créer de nouveaux. Mais, outre le fait qu’elle résulte d’une initiative de droite (et, comme telle, en des temps – espérons-nous – révolus, encourt l’opposition de la gauche), son coût pour la collectivité a fait l’objet de plusieurs estimations fort contrastées qui ont alimenté une vive controverse (voir le dossier sur la loi Robien publié dans la revue Futuribles n°217 de février 1997).
Ces estimations toutefois étaient ex-ante, explique Hervé Passeron, vice-président du BIPE qui, conjointement avec le cabinet Bernard Brunhes, a été chargé par la Commission des Finances de l’Assemblée Nationale de procéder à une première évaluation sur la base des accords déjà conclus. Le BIPE, en faisant tourner ses modèles de prévision macro-économiques qui permettent de prendre en compte les effets secondaires, livre un chiffrage des avantages et des coûts directs et indirects que pourrait entraîner une généralisation des « accords Robien ».
Pour Hervé Passeron, il ne semble faire aucun doute que ce dispositif est autrement plus performant et moins coûteux que toutes les autres mesures jusqu’à présent utilisées dans la lutte contre le chômage.
Réduction du temps de travail et emploi : du bon usage de la loi Robien
Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 221, juin 1997