Contrairement aux espoirs formés par ses » pères fondateurs « , la création du Marché unique n’aura pas spontanément entraîné l’édification d’une Europe politique et celle-ci, du reste, demeure un objet de controverses entre ceux qui se satisfont de l’instauration d’une zone de libre-échange, et ceux qui aspirent à aller plus loin et à doter l’Union d’institutions politiques dignes de ce nom (voir l’article d’Yves Bertoncini).
En même temps, cette Union européenne, qui est passée de 6 à 15 États membres, se trouve aujourd’hui confrontée à l’immense défi de son élargissement :
– d’abord, aux 12 pays – essentiellement des PECO (pays d’Europe centrale et orientale) – dont la candidature a déjà été acceptée ;
– ensuite, à une douzaine d’aspirants nouveaux qui amèneraient l’Union à s’étendre à une quarantaine de membres.
Jean-François Drevet, soulignant l’écart en termes économiques et politiques entre les membres de l’Union et les pays candidats, met en évidence les enjeux liés à l’élargissement de l’Union à 27 membres. Il montre en substance que ce défi est de même ampleur que celui que représentait l’unification allemande, et qu’il ne pourra être relevé qu’au prix d’un redéploiement important des fonds structurels.
Quant à l’adhésion à un stade ultérieur des autres pays du Sud et de l’Est, dont la mise à niveau en termes économiques et politiques sera encore plus difficile, l’auteur l’estime politiquement indispensable.
Il montre cependant que ces élargissements successifs, pour souhaitables qu’ils soient, risqueraient d’entraîner une dilution de la Communauté européenne si elle ne s’accompagnait pas d’un approfondissement, notamment de la création d’un noyau dur (l’Europe carolingienne) capable d’assumer sa fonction d’avant-garde.
Inévitable, en tout cas, apparaît la constitution d’une Europe à la carte qui se traduirait par la création, au-delà d’une union économique et monétaire renforcée, de différents cercles de pays s’intégrant à des rythmes différents.
Une Europe rassemblée ou intégrée
Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 259, déc. 2000