Pendant très longtemps, et notamment sous l’effet de l’industrialisation, la vie sociale fut structurée à partir du temps de travail, celui-ci tendant à se caler sur un mode unique : tous au travail à la même heure, au même endroit.
Plusieurs tendances nouvelles se dessinent : la diversification des durées du travail, la désynchronisation des horaires, l’imbrication croissante entre lieux et horaires de travail et de non-travail, notamment sous l’effet des nouvelles formes d’organisation et d’emploi d’une part, de l’augmentation des taux d’activité féminine d’autre part (les femmes ayant, du fait de la permanence de la répartition des tâches, à concilier plusieurs types de temps contraints).
Ainsi évoluons-nous vers une société marquée par une porosité croissante entre travail et non-travail, et par une forte désynchronisation des temps sociaux avec, à la clef, tout le débat sur, par exemple, l’accessibilité des services et donc les heures d’ouverture des services publics, des commerces, etc.
Pour mieux concilier les horaires atypiques, décalés, pour harmoniser un minimum ces différents temps sociaux, des initiatives intéressantes ont été adoptées en Italie, en Allemagne, aux Pays-Bas, en France, au niveau local. Elles visent à réunir dans des » bureaux du temps » les différents protagonistes de la vie sociale, pour essayer, en dépit de cette forte individualisation des temps sociaux et de l’aspiration de chacun au temps choisi, de définir des plages de temps pour les activités collectives.
Ce processus que décrit Jean-Yves Boulin ne fait que commencer. Nul ne doute cependant qu’il devrait se développer et nous conduire progressivement à entretenir avec le temps et l’espace des relations très différentes de celles que nous avons connues à une époque où tous travaillaient au même moment et au même endroit.
Pour une urbanistique des temps. La désynchronisation des temps sociaux
Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 285, avr. 2003