Le développement de nouvelles plates-formes de type « coopératif », qui se présentent comme véritables alternatives aux plates-formes « capitalistes », semble s’être accéléré depuis un an. Ce coopératisme considère les plates-formes comme de véritables communs [1] et développe pour cela un ensemble de principes ayant pour but de remettre en cause la logique uniquement financière de l’ubérisation [2]. Celles-ci se caractérisent en effet à la fois par les modalités d’intermédiation qu’elles mettent en œuvre (l’algorithme n’est plus élaboré seulement dans une optique d’optimisation financière) et par leurs systèmes de gouvernance, qui intègrent une représentation des utilisateurs. Quelle est la motivation de ce phénomène ? Quelles sont les particularités de ces plates-formes et de leur fonctionnement ? Dans quels domaines peuvent-elles être amenées à se développer ? Quels sont les freins potentiels à ce développement ?
La plate-forme : un objet ambigu
Les plates-formes peuvent être définies comme « des services électroniques jouant une fonction d’intermédiaire dans l’accès à des informations, à des contenus, des services ou des biens entre pairs [3] ». Dans son acception la plus libérale, la plate-forme représente la réduction de l’entreprise à la structure juridique du capital de la société commerciale qui permet à l’entreprise de s’affranchir de sa responsabilité sociale par la transformation des relations salariales en contrats de service. Selon Neal Gorenflo, cofondateur de l’association Shareable, les plates-formes capitalistiques comme Uber ou Airbnb, élaborées pour la maximisation des profits, exploitent ainsi, grâce à un vide juridique et politique, un précariat facilité par leurs positions ...