D’ici le mois de juin 2003, la Convention doit proposer pour l’Europe élargie des institutions enfin adaptées aux finalités que poursuit l’Union. Bienvenu est donc cet article de Robert Toulemon qui, soulignant la dimension politique et humaniste de la construction européenne, nous propose une synthèse entre les deux écoles qui, depuis un demi-siècle, s’affrontent, l’école intergouvernementale et l’école fédérale.
Après avoir rappelé l’enjeu du débat – » éviter que l’Europe élargie soit impotente » -, l’auteur traite successivement : des objectifs et des compétences de l’Union ; de l’architecture institutionnelle qui pourrait être la sienne ; enfin, de la procédure constituante et de ce qu’il appelle la nécessaire différenciation dans l’intégration.
S’agissant des objectifs et des compétences, il est important de savoir ce que nous voulons faire ensemble. Bien au-delà du marché unique, nous voulons -affirme Robert Toulemon – construire une Europe politique disposant de réels pouvoirs en matière de politique étrangère et de défense, ainsi, au plan intérieur, que de compétences en matière de sécurité mais aussi dans le domaine social, fiscal…
Très clairement, l’auteur souligne que le préambule d’une éventuelle Constitution devrait s’attacher à rappeler les compétences essentielles dévolues à l’Union et, en revanche, s’assurer que les institutions européennes ne se noient pas dans le détail, que les interventions communautaires dans les domaines » mineurs » (règles d’hygiène, dates d’ouverture de la chasse…) restent du ressort des États ou des régions.
S’agissant de l’architecture institutionnelle, l’auteur, renvoyant dos à dos les fédéralistes et les partisans de l’école intergouvernementale, milite pour l’institution d’une présidence de l’Union auprès de laquelle serait institué un » présidium » composé de cinq ou six personnalités qui – cela est un point important – ne serait pas chargé de représenter les intérêts particuliers des États membres mais bien l’intérêt commun de l’Europe. En même temps, il avance un certain nombre de propositions concernant et la démocratisation de l’Union et l’organisation des instances législatives indispensables.
S’agissant enfin de la procédure constituante et de la » différenciation dans l’intégration « , l’auteur s’interroge sur les voies et moyens par lesquels l’on pourrait sortir du dilemme actuel qui fait obstacle à l’expression d’une véritable volonté politique européenne, notamment sur le processus de décision, et à la règle d’une unanimité qui constitue un facteur trop fréquent de paralysie.
Critiquant vivement le fait qu’une petite minorité puisse durablement faire obstacle à une volonté majoritaire affirmée, même en matière constitutionnelle, Robert Toulemon avance différentes propositions pour permettre aux instances communautaires de disposer de toute l’efficacité et de la rapidité qu’exigent certaines décisions. Il propose notamment l’instauration d’une règle simple de double majorité qui laisserait aux États une certaine liberté de choix sans cependant paralyser toute l’Union.
Europe fédérale/Europe des États : une troisième voie
Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 282, jan. 2003