En France, jusqu’à maintenant, la ville et les équipements et services qui la structurent ont toujours été « gratuits » au sens propre (l’accès à ces équipements et services n’est pas payant), ou peu chers (facturés bien en deçà de leur coût réel), comme le rappelle Isabelle Baraud-Serfaty en ouverture de cet article. Néanmoins, cette gratuité dont bénéficient les usagers de la ville résulte d’un modèle économique dans lequel le financement repose principalement sur l’impôt (donc les contribuables) et les plus-values (payées par les propriétaires finaux) ; un modèle aujourd’hui menacé selon l’auteur. Crise des finances publiques, moindre création de valeur à mesure que la ville se renouvelle « sur elle-même », évolution des mentalités en défaveur de la gratuité systématique, et changement d’échelle dans la production de divers biens et services urbains constituent les quatre principales menaces à la gratuité de la ville, identifiées par Isabelle Baraud-Serfaty.
Pour autant, les technologies de l’information et la révolution numérique qu’elles ont engendrée montrent que de nouveaux modèles économiques émergent, qui pourraient renouveler la notion de gratuité de la ville : modèle « freemium », modèles « bifaces ou multifaces », modèle de l’effacement, modèles paramarchands… Comme le montre l’auteur, divers modèles économiques innovants sont apparus ces dernières années, et pourraient trouver à s’appliquer dans les villes et permettre de repenser l’articulation entre les demandes et besoins des usagers, et les offres et réponses susceptibles d’y être apportées par les services publics et autres opérateurs de la ville (y compris privés), voire par les usagers eux-mêmes. Nous sommes bien à l’aube de l’ère de la ville « intelligente », mais la définition de ses contours et modes de financement est un chantier encore loin d’être achevé.