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Rétrospective de la prospective dans les transports et l'aménagement du territoire

Analyse de rapport

PLASSARD François, « Rétrospective de la prospective dans les transports et l’aménagement du territoire », Futuribles International, TRP, 20, mars 2004, 130 p.

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De nombreux travaux de prospective en matière de nouveaux produits ont échoué en sous-estimant les difficultés de leur diffusion, ainsi que celles de création de nouveaux usages. Ces travaux ont très peu souvent fait l’objet d’analyses rétrospectives qui auraient permis de mieux comprendre les erreurs de méthode ou d’appréciation, et de repérer en fonction de quels critères certains paramètres ont été jugés importants et d’autres laissés de côté. À travers une recherche exploratoire s’appuyant sur l’analyse de travaux prospectifs réalisés dans le domaine de l’informatique et des transports entre 1970 et 1980, François Plassard a essayé de répondre à ces interrogations en se fixant trois objectifs : – distinguer les tendances lourdes correctement identifiées des réels efforts de prospective, et surtout des simples traductions de croyances ou de mythes communément acceptés tant par la population que par les scientifiques de l’époque ; – définir les lieux de  » porosité  » entre le futur projeté et le futur réalisé, passés inaperçus, où se sont amorcées de véritables innovations qui ont fait s’écarter l’avenir réel de l’avenir  » prospecté  » ; – éclairer les modes de fonctionnement de la société contemporaine et fournir une analyse des caractéristiques sociales actuelles. Son analyse critique débute par l’étude du schéma prospectif pour la France à l’horizon 2000 réalisée par l’OTAM (Omnium technique d’aménagement), à la demande de la DATAR (Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale), et publiée en 1971 (DATAR. Une image de la France en l’an 2000, scénario de l’inacceptable. Paris : Futuribles (Travaux et recherches de prospective), juillet 1971, 173 p.). Même si ce travail prospectif, utilisant la méthode des scénarios, a permis quelques bonnes anticipations (augmentation des disparités sociales, montée du nationalisme, ségrégation urbaine), François Plassard met en exergue plusieurs difficultés telles que la plasticité des tendances lourdes qui font pencher en faveur de la stabilité, les indéterminations liées au monde extérieur, le poids des idéologies dominantes et l’incapacité à envisager le pire. L’exemple des approvisionnements en pétrole, qui sont devenus des éléments clefs des scénarios seulement après le premier choc pétrolier, est révélateur de ces obstacles. La deuxième analyse se penche sur deux études de prospective technologique publiées par McGraw-Hill respectivement en 1970 et en 1979, qui proposent une date d’apparition pour différents produits en ayant recours à la méthode Delphi. Elle montre quelques-unes des limites de cette méthode, liées particulièrement au comportement des experts interrogés qui répond de facto à certaines règles implicites de construction sociale et place les fondements techniques au second plan : – la prévision de l’apparition d’une innovation dans un domaine donné reflète l’espérance ou l’inquiétude de la société vis-à-vis de ce domaine au même moment ; – le délai annoncé traduit généralement l’urgence sociale de trouver une solution ; – les  » fenêtres  » de prévision sont généralement courtes, i.e. inférieures à 10 ans ; – la lenteur de la diffusion de l’innovation au sein de la société est complètement sous-estimée. La dernière analyse examine des travaux de prospective plus littéraires des années 1970 (un ouvrage et plusieurs articles) présentant un état futur global de la société sans estimation chiffrée systématique. François Plassard en retient exclusivement les traits relatifs à l’informatique et aux transports. Bien que l’aspect  » littéraire  » des documents permettrait de penser que les auteurs se seraient sentis libérés par l’absence de contraintes méthodologiques, il n’en est rien. Force est de constater que ces exercices s’approchent de l’épreuve plus technique que littéraire : une imagination bridée par de lourdes descriptions techniques, une approche très sectorielle, des difficultés à fournir un rendu global et cohérent, etc. La technologie y joue un rôle moteur. Elle s’impose, fait naître de nouveaux usages et représente une solution aux problèmes de société, apportant ainsi le « bonheur ». Ces travaux révèlent également, implicitement ou explicitement, de grandes incertitudes politiques, économiques et technologiques. En fait, très loin d’un schéma littéraire classique, ils sont très proches des travaux de prospective technologique.
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